Les considérations anatomiques générales que présente la moelle épinière sont relatives : à sa forme ; à son poids et à ses dimensions ; à sa couleur et à sa consistance ; à sa direction ; à ses limites et à ses rapports généraux ; à ses moyens de fixité.
Forme
La forme de la moelle, comme nous le montre la figure ci-dessous, est celle d’une longue tige sensiblement cylindrique qui descend de l’encéphale dans le canal rachidien, d’où le nom de prolongement rachidien de l’encéphale que lui avait donne improprement Chaussier. C’est d’ailleurs là l’aspect d’une moelle extraite du canal rachidien et qui, grâce à sa flexibilité, s’étale sur un plan horizontal.
La moelle ne représente pourtant pas un cylindre parfait. Tout d abord, elle est légèrement aplatie d’avant en arrière, de telle sorte que son diamètre transversal l’emporte constamment de un millimètre à un millimètre et demi sur son diamètre antéropostérieur. D’autre part, le cylindre médullaire nous présente deux renflements fusiformes fort étendus, occupant, l’un, la région cervicale, l’autre, la région dorso-lombaire. On peut ainsi diviser la moelle en cinq régions : la partie supérieure, le renflement cervical, la partie dorsale, le renflement lombaire et le cône terminal, où la moelle s’effile pour ainsi dire à la manière d’un crayon taillé et au delà duquel elle se continue par le filum terminale.
- La partie supérieure, longue d’environ 2 centimètres, étendue du collet du bulbe au commencement du renflement cervical, est cylindrique ; elle correspond surtout a l’axis et s’étend du trou occipital à la troisième vertèbre cervicale. Elle donne naissance aux trois premières paires cervicales destinées au cou et à la nuque.
- Le renflement supérieur ou cervical, encore appelé brachial parce qu’il donne naissance aux nerfs du membre supérieur, a l’apparence d un fuseau aplati d'avant en arrière. Il s’étend de la troisième cervicale à la deuxième dorsale sur une longueur de 10 à 12 centimètres. Son plus grand diamètre correspond à la sixième vertèbre cervicale (14 millimètres) De lui se détachent toujours la quatrième paire cervicale, origine principale du nerf phrénique, les cinq, six, sept, huit paires terminales et la première dorsale qui par leur union constituent le plexus brachial
- La partie dorsale ou thoracique est régulièrement arrondie ; sa partie moyenne légèrement étranglée marque la région la plus étroite de la moelle. Elle s’étend sur une longueur de 18 à 22 centimètres, de la deuxième vertèbre dorsale à la neuvième ou dixième, et donne naissance aux onze derniers nerfs intercostaux.
- Le renflement lombaire ou crural correspond aux nerfs du membre inférieur ; il s’étend de la neuvième ou dixième vertèbre dorsale a la première ou seconde lombaire, sur une longueur de 7 à 9 centimètres. Son diamètre, plus petit que celui du renflement cervical, atteint 12 centimètres au niveau de la douzième dorsale. Son nom est à peine justifié puisqu’il est compris en majeure partie dans la partie dorsale du canal rachidien.
- Le cône terminal ou cône médullaire, enveloppé par des racines nerveuses dites nerfs de la queue du cheval, est l’extrémité effilée du renflement lombaire. Il est difficile de préciser ses limites, car il se confond en haut sans ligne de démarcation avec le renflement lombaire et en bas avec le filum terminale. Pfitzner lui donne comme limite le nerf coccygien ; dans ce cas, Je cône a souvent une longueur presque nulle. Charpy le comprend entre les plans passant en haut par la naissance du cinquième nerf sacré et en bas par le point où le filum terminale prend une épaisseur constante. A la suite des travaux de Dufour, de Billaud, il faut comprendre sous le nom d 'épicône la région d’où émergent la cinquième paire lombaire et les deux premières sacrées ; nous réservons le nom de cône médullaire au segment répondant aux troisième, quatrième et cinquième paires sacrées et au segment coccygien. Les centres génitaux, anaux et vésicaux sont situés dans ce segment.
- Le filum terminale, encore appelé ligament caudal ou coccygien, est un cordon mince qui prolonge inférieurement la moelle, dont il n est qu’un vestige embryonnaire atrophié. Il s’étend du sommet du cône terminal à la base du coccyx, sur la face postérieure de laquelle il s’insère. Son diamètre est de 2 millimètres en moyenne, sa longueur de 25 centimètres environ. Il est noyé dans le paquet des nerfs de la queue de cheval, dont il occupe le centre de la partie postérieure et dont il se distingue par son aspect
Moelle épinière, bulbe et protubérance : A, vue antérieure ; B, vue postérieure.
(Pour ne pas agrandir démesurément les dimensions verticales des deux figures, le filum terminale a été détaché de l’extrémité inférieure de la moelle et placé entre les deux)
1, sillon médian antérieur. — 2, sillon médian postérieur. — 3, sillon collatéral postérieur. — 4 sillon intermédiaire postérieur. 5, renflement cervical. — 6, renflement lombaire. — 7, cône terminal. — 8 ligne d’implantation des racines antérieures — 9, cordon latéral. — 10, pyramide antérieure du bulbe. — 11, olive.— 12, pyramide postérieure. 13, corps restiforme. — 14, protubérance. — 15, tubercules quadrijumeaux. — 16 filum terminale avec a, extrémité supérieure répondant à l’extrémité inférieure de la moelle ; b, son extrémité inférieure répondant au coccyx.
chatoyant. La queue de cheval est l'ensemble des racines des derniers nerfs rachidiens. Parties du renflement lombaire, elles parcourent un long trajet vertical pour se rendre de leur point d’émergence à leur point de sortie, rappelant dans une certaine mesure le mode d’implantation des crins sur la queue d’un cheval.
Cône terminal et racines sacrées. Les nerfs de la queue de cheval ont été rejetés légèrement en dehors.
Face antérieure: 1, cône terminal. — 2, filum terminale. — 3, veine médiane antérieure de la moelle. — a, b, c, d, e, racines sacrées.
Cône terminal et racines sacrées. Les nerfs de la queue de cheval ont été rejetés légèrement en dehors.
Face postérieure: 1, cône terminal. — 2, fillum terminale. — 3, veine médiane postérieure. — a, b, c, d, e, racines sacrées.
La queue de cheval est contenue dans le fourreau fibreux de la dure-mère, qui se termine en cul-de-sac conique au niveau de la deuxième vertèbre sacrée : les nerfs lombaires et sacrés s’en échappent latéralement, tandis que le filum terminale émerge du sommet du cône durai en compagnie des nerfs coccygiens. On peut donc reconnaître deux portions au filum terminale : une partie interne ou supérieure contenue dans le sac durai, une partie externe ou inférieure, située en dehors de lui. Cette dernière partie est fibreuse et résistante.
Signification des renflements de la moelle. Segments médullaires
Envisagés d’une manière générale, les deux renflements sont la conséquence de l’apparition et du développement des membres, comme nous le démontre nettement l’embryologie. Depuis déjà longtemps. Serres a établi pour le poulet (et des observations analogues ont été faites depuis pour bon nombre de mammifères) que la moelle est, dans les premiers stades de son développement, uniformément cylindrique : ce n’est que le sixième jour, quand les membres postérieurs font leur apparition sur les côtés du tronc, que e renflement postérieur apparaît lui aussi sur la moelle lombaire ; quant au renflement antérieur, il ne se montre que deux jours plus tard, en même temps que se voient sur les côtés du tronc les ébauchés du membre antérieur. Les deux renflements antérieur et postérieur apparaissent en même temps que les membres homonymes ; puis, une fois qu’ils ont fait leur apparition, ils s’accusent progressivement au fur et à mesure que les membres se développent. Les deux formations anatomiques sont donc intimement liées l’une à l’autre.
L’anatomie comparée confirme les enseignements de l’embryologie. Si nous étudions en effet, dans la série animale, les deux renflements en question, nous constatons que leur développement est toujours en rapport avec celui des membres correspondants : très développés chez les animaux qui ont des membres longs et puissants (ex. : anthropoïdes, carnassiers, etc.), ils sont considérablement leduits chez ceux que caractérisent des membres rudimentaires (ex. : renflement lombaire pour le phoque et les cétacés,-renflement cervical pour les marsupiaux) et font complètement défaut chez ceux qui, comme les serpents, sont entièrement dépourvus de membres.
La tératologie et l’anatomie pathologique, à leur tour, nous apportent leur contingent de preuves, la première en nous faisant connaître que les renflements, soit cervical, soit lombaire, sont très atténués chez les sujets qui ont des membres avortés ( ectromélie ), la seconde en nous montrant que l’amputation d un membre détermine à la longue la diminution de volume du renflement qui lui correspond.
Gale et Spurzheim prétendaient (1810) que la moelle épinière de l’homme comme celle des animaux présentait un léger renflement au niveau de chaque paire rachidienne. Ces auteurs considéraient la moelle comme une série de segments superposés rappelant jusqu’à un certain point la moelle ventrale des invertébrés. Cette disposition segmentaire se traduit à l’œil chez les vertébrés inférieurs (telle la couleuvre à collier). Une pareille disposition en chapelet a été vue par Schifferdecker chez le chien et par Waldeyer chez le gorille.
D’un autre côté, la physiologie expérimentale nous apprend que si, à l’exemple de Masius et van Lair, on pratique deux sections de la moelle épinière, l’une au-dessus, l’autre au-dessous d’une paire rachidienne, le segment médullaire ainsi isolé se suffit à lui-même pour produire des réflexes et, de ce fait, jouit manifestement d’une certaine individualité. Nous savons, du reste, que des centres fonctionnels, tels que le centre cilio- spinal, le centre ano-spinal et le centre génito-spinal, ont pu être localisés, dans tel ou tel segment de la moelle épinière.
Dès lors, il paraît rationnel de penser que, malgré sa forme extérieure, où toute trace de division a disparu au cours du développement ontogénique, la moelle épinière des mammifères, analogue en cela à celle des vertébrés inférieurs, n’en est pas moins, physiologiquement, un composé de segments appelés neuromères, à chacun desquels correspondent, à droite et à gauche, une zone cutanée ou dermatomère et un groupe musculaire ou myomère.
Des faits cliniques, aujourd’hui fort nombreux et bien interprétés par Brjssaud ( Presse médicale, 1894), anesthésie localisée, éruptions cutanées d’origine nerveuse (zonas), déposent en faveur d’une pareille assertion : ils trouvent dans la métamérie spinale une explication des plus satisfaisantes, en même temps qu’ils lui apportent l’appui d’une démonstration, qui, pour être indirecte, n’en a pas moins une grande valeur. Ces mêmes faits cliniques nous apprennent encore que la division métamérique du tégument externe en correspondance avec la disposition segmentaire de la moelle épinière s’observe non seulement sur le tronc, mais encoie sur les membres et cela se comprend, chacun des membres se développant aux dépens d’un certain nombre de métamères. Nous aurons a revenir sur cette question à propos du système nerveux périphérique, et nous indiquerons alors, en nous basant sur des travaux récents, quels sont les territoires qui, sur le membre supérieur et le membre inférieur, sont en rapport avec tel ou tel segment de la moelle.
Dimensions. Poids
Arrivée à son complet développement, la moelle présenterait 45 centimètres de longueur d’après Sappey, 44 cm,8 d’après Kavenel, 46 cm,8 d’après Pfitzner. En mesurant la moelle épinière sur huit sujets, quatre hommes et
Schéma montrant qu’à chaque étage correspond un étage périphérique (d’après Brissaud).
quatre femmes, nous avons obtenu un chiffre moyen un peu moins élevé : 43 centimètres.
Chez l’homme elle serait de 45 centimètres et chez la femme de 41 centimètres. S’il y a une différence de longueur absolue, la longueur relative (rapportée à la taille totale) est la même.
Quant à ses dimensions sur le plan horizontal, elles varient naturellement suivant les points examinés, la moelle, comme nous l’avons déjà vu, étant un cylindre irrégulièrement calibré, présentant deux renflements séparés par une portion intermédiaire relativement étroite. Voici quels sont, pour chacune de ces trois régions, la circonférence du cylindre médullaire, son diamètre transversal et son diamètre antéro-postérieur.
|
RENFL. CERVICAL |
RENFL. LOMBAIRE |
PORT. INTERMÉDIAIRE
|
Circonférence |
38 mm |
33 mm |
27 mm |
Diamètre transversal |
13 |
12 |
10 |
Diamètre antéro-postérieur |
9 |
9 |
8 |
Quant au poids absolu de la moelle épinière dépouillée des racines et des nerfs rachidiens, il est en moyenne de 26 à 30 grammes chez l’homme, 1 ou 2 grammes de moins chez la femme. Sappey a pris successivement, sur huit sujets du sexe masculin et âgés de vingt-cinq à soixante ans, le poids de la moelle, de l’isthme de l’encéphale, du cervelet, du cerveau et de l’encéphale tout entier. Voici quel est, en moyenne, le poids absolu de chacune des portions du névraxe :
Moelle épinière |
27 grammes |
Isthme et bulbe |
26 |
Cervelet |
140 |
Cerveau |
1 170 |
Encéphale |
1 358 |
Si nous comparons entre ces divers chiffres, nous voyons que le poids de la moelle épinière est à celui :
De l’isthme et du bulbe |
comme |
1 : 1 |
Du cervelet |
comme |
1:5 |
Du cerveau |
comme |
1 : 43 |
De l’encéphale |
comme |
1 : 48 |
Ce qui revient à dire que la moelle épinière présente le même poids que l’isthme et le bulbe réunis, qu’elle pèse cinq fois moins que le cervelet, quarante-trois fois moins que le cerveau, quarante-huit fois moins que l’encéphale. La moelle représente donc en chiffres ronds, chez l’homme, les 2 centièmes de la masse encéphalique. Nous ajouterons que ce rapport volumétrique ou pondéral de la moelle à l’encéphale présente son minimum chez l’homme. Il va ensuite en augmentant à mesure qu’on descend dans la série zoologique, non pas parce que la moelle a un volume graduellement croissant, mais parce que le cerveau perd peu à peu de l’importance considérable qu’il a acquise chez les primates et en particulier chez l’homme.
La densité de la moelle épinière étudiée par Krause et Fisher (1866) est de 1,0244 pour la substance blanche et de 1,0382 pour la substance grise. Plus récemment, Bais- brocchi (1884) est arrivé aux chiffres suivants pour la densité de la moelle totale : 1,0387 pour l’homme, 1,0348 pour la femme.
Couleur et consistance
La couleur de la moelle est d’un blanc mat et opaque Les taches ardoisées de la surface sont dues à une pigmentation de la dure-mère.
La moelle a une consistance pâteuse, plus ferme cependant que celle du cerveau, sans doute à cause de l’épais manteau de substance blanche qui constitue sa périphérie. D’après Chaussier, cette consistance serait un peu moindre chez- la femme que chez l’homme et elle irait en diminuant de l’enfant à l’adulte et de celui-ci au vieillard.
Direction
La moelle épinière suit exactement les inflexions de la colonne vertébrale. Elle présente, par conséquent, deux courbures : une courbure cervicale et une courbure dorsale, la première à concavité postérieure, la seconde à concavité dirigée en avant.
L’origine supérieure de la courbure dorsale est nettement indiquée, sur le plan antérieur de la moelle, par une sorte de promontoire, saillant en avant, qui répond à l’émergence du septième ou du huitième nerf cervical.
On pourrait penser au premier abord que ces courbures n’existent que parce que la moelle, renfermée dans un canal flexueux, est obligée de suivre les inflexions de ce dernier. Il n’en est rien, car, si on enlève la moelle et si on la plonge dans un liquide de même densité, le liquide de Müller, par exemple, on constate nettement que les courbures précitées persistent, avec leur même situation et leur même orientation (Flesch, Tanzi). Les courbures de la moelle épinière appartiennent donc en propre à cet organe. Les recherches de Flesch sur les animaux nous apprennent même qu’elles se montrent de très bonne heure et qu’elles précèdent, dans leur développement, celui de la colonne vertébrale elle-même. Il en résulte que l’enveloppe osseuse de la moelle, au lieu d’influencer cette dernière, est au contraire influencée par elle : le rachis se modèle sur la moelle, comme la paroi crânienne se modèle sur la masse encéphalique.
Limites et rapports généraux
Entièrement renfermée dans le canal osseux que lui forme la colonne vertébrale, la moelle épinière répond, naturellement, aux divers éléments osseux qui constituent ce canal, savoir : en avant, aux corps vertébraux et aux disques fibro-cartilagineux qui les unissent ; en arrière, aux lames vertébrales et à la base des apophyses épineuses : sur les côtés, aux apophyses articulaires et, en avant d’elles, aux pédicules vertébraux que séparent les trous de conjugaison.
Quel que soit le niveau où on l’examine, la moelle épinière occupe toujours la partie centrale du canal rachidien. Mais il s’en faut de beaucoup qu’elle le remplisse entièrement. Le diamètre de la moelle étant à celui du canal comme 3 est à 5, il existe entre elle et la paroi squelettique un espace relativement considérable, que nous appellerons l’espace périmédullaire. Rappelons, en passant, que cet espace est plus considérable à la région cervicale, où les vertèbres sont très mobiles, qu’à la région dorsale, où les vertèbres ne jouissent que de mouvements très limités. Une distance de 3 à 8 millimètres sépare la moelle de son canal osseux.
La moelle, vue latérale, gauche
1, protubérance. — 2, bulbe. — 3, 3, moelle avec : 4, sa courbure cervicale ; 5, sa courbure dorsale. — 6, sorte de promontoire séparant ces deux courbures. — 7, cône terminal.
L’espace périmédullaire est divisé par la dure-mère en deux parties : l’une située en dedans de la méninge fibreuse, c’est l’espace sous-dural ; l’autre située en dehors, c’est l’espace sus dural. L’espace sous-dural renferme l’arachnoïde, les espaces sous-arachnoïdiens (avec le liquide céphalo-rachidien qui les remplit) et, enfin, la pie-mère, qui repose directement sur la surface extérieure de la moelle. — L'espace sus-dural ou épidural, à son tour, est comblé par les plexus veineux intrarachidiens, par une graisse demi-fluide et, au contact même de la colonne vertébrale, par l’appareil ligamenteux qui réunit les unes aux autres les différentes pièces constitutives de cette colonne. Parmi ces ligaments, nous rappellerons principalement les ligaments jaunes, qui relient entre elles les lames vertébrales, et le ligament vertébral commun postérieur, qui descend, ruban large et ininterrompu, à la partie postérieure des corps vertébraux.
Au total, une pointe qu’on dirigera de dehors en dedans, jusqu’à la moelle épinière, rencontrera successivement :
- les parties molles extrarachidiennes, de nature et d’épaisseur variables suivant les régions ;
- la paroi du canal rachidien, également très variable suivant les points où on intervient ;
- l’espace épidural, avec son contenu (graisse demi- fluide et plexus veineux) ;
- la dure-mère ;
- l’espace sous-dural, avec l’arachnoïde ; le liquide céphalo-rachidien ;
- enfin, la pie-mère et la moelle qui lui est immédiatement sous-jacente.
Si la moelle épinière occupe le canal rachidien qui lui sert de gaine protectrice, elle ne le remplit pas tout entier. Elle s’arrête à la hauteur de la deuxième lombaire et tout le reste du canal jusqu’au coccyx est occupé par le filum terminale et par les nerfs de la queue de cheval.
La moelle remplit un peu moins des deux tiers de la longueur totale du canal.
Sa limite supérieure est marquée par le collet du bulbe ou par le plan passant à l’extrémité inférieure de la décussation des pyramides; elle répond : en avant, au milieu de l’apophyse odontoïde et au milieu de l’arc antérieur de l’atlas ; en arrière, elle est située un peu au-dessus de Tare postérieur. La limite inférieure indiquée par le sommet du cône médullaire offre moins de constance ; elle répond le plus souvent au corps de la deuxième vertèbre lombaire, de sorte qu’un instrument passant entre la première et la deuxième lombaire a les plus grandes chances de traverser la moelle à la base du cône terminal (expériences de Longet et Cruveilhier). L’enveloppe fibreuse de la dure-mère se termine avec le cul-de-sac durai au niveau de la deuxième vertèbre sacrée, comme l’ont confirmé les radiographies après injections intrarachidiennes de lipiodol faites sur le vivant (Sicard et Forestier, Froment et Dechaume).
La moelle épinière n’occupe donc que la portion cervicale, la portion thoracique et la partie toute supérieure de la portion lombaire du canal vertébral. La majeure partie de la région lombaire et le canal sacré tout entier ne contiennent que des racines nerveuses.
Coupe horizontale du rachis passant par la partie supérieure de la sixième vertèbre cervicale.
1, sixième cervicale. — 2, son apophyse transverse, avec : 2', tubercule antérieur ; 2", tubercule postérieur. — 3, apophyse épineuse de la cinquième. — 4, ligament interépineux. — 5, périoste. — 5', ligament vertébral commun postérieur. — 6, moelle épinière. — 7, dure-mère. — 8, espace épidural. —- 9, cavité arachnoïdienne ou espace sous-dural. — 10, paquet de racines antérieures. — il, paquet de racines postérieures. — 12, racines postérieures et ganglion spinal. -— 13, racine antérieure en coupe. — 14, artère et veine vertébrales. — 15, veines intrarachidiennes. — 16, apophyse articulaire supérieure.
Embryon humain de trois mois de grandeur naturelle (d’après Kollikkr).
1, hémisphères cérébraux. — 2, cerveau moyen. — 3, cervelet. — 4, bulbe. — 5, moelle épinière, avec : 5', son renflement cervical ; 5", son renflement lombaire.
Ascension apparente de la moelle
Au premier mois de la vie embryonnaire, la moelle occupe la totalité du canal vertébral, y compris le canal sacro-coccygien. Il en est ainsi jusqu’à la fin du troisième mois : à cette époque, les racines nerveuses sortent à angle droit par le trou de conjugaison
Les racines rachidiennes et leurs segments médullaires correspondants.
En orangé: racines et segments cervicaux. — En vert: racines et segments dorsaux. — En ronge: racines et segments lombaires. — En bleu : racines et segments sacrés.
correspondant. Au quatrième mois, la croissance de la moelle et celle de la colonne ne sont plus parallèles : à cette époque, la longueur de la colonne vertébrale est de 8 centimètres, celle de la moelle
Schéma de concordance destiné à montrer les rapports des apophyses épineuses des corps vertébraux avec les segments médullaires et les racines rachidiennes.
Lire attentivement cette figure. Remarquer l’obliquité progressive des racines. Le premier segment dorsal répond à l’apophyse épineuse de CVII. Le premier segment lombaire à l’apophyse épineuse de DX : L1 à Dx, S1 à DXII, SV à LII.
de 7 centimètres. La différence s’accuse de plus en plus et, chez l’enfant d’un an, la colonne vertébrale atteint 27 centimètres, tandis que la moelle ne dépasse pas 20 centimètres. Il résulte naturellement de ce défaut de parallélisme entre le développement du tube contenant et du cylindre contenu : 1 ° que le cône terminal, alors même qu’il n’a cessé de s’allonger, se trouve situé maintenant à 8 centimètres au-dessus de la base du coccyx ; 2° que chaque segment de moelle se trouve, de même, situé au-dessus de la vertèbre ou de l’espace intervertébral qui lui correspondait directement pendant la vie embryonnaire.
Une dernière conséquence de l’ascension apparente de la moelle au cours de son développement ontogénique est un changement de direction des racines des nerfs rachidiens. Primitivement, quand la moelle a la même longueur que le canal rachidien, le point d’origine spinal de ces racines est placé sur le même plan horizontal que les trous de conjugaison vers lequel elles se rendent : en conséquence, elles suivent un trajet nettement transversal. Plus tard, par suite des faits exposés ci-dessus, les trous de conjugaison sont descendus au-dessous du point d’émergence des nerfs auxquels ils livrent passage et, de ce fait, ces nerfs sont maintenant obligés, pour gagner leurs trous respectifs, de suivre une direction oblique en bas et en dehors.
Ce sont ces constatations qui permettent, d’après les schémas de Dejerine, de pouvoir se repérer sur une moelle enlevée avec sa dure-mère en se servant des orifices de sortie des racines médullaires. Par ailleurs, Chipault a établi des schémas à la suite de constatations nombreuses destinées à montrer la correspondance des segments médullaires et des corps vertébraux. On conçoit l’importance de pareils faits en clinique.
Moyens de fixité.
Au milieu de toutes ces parties molles, qui deviennent pour lui autant de moyens de protection, le cylindre médullaire reste fixe et à peu près immobile. Il doit cette fixité à un ensemble de dispositions anatomiques que nous allons rapidement énumérer :
- a) A son extrémité supérieure, tout d’abord, la moelle est maintenue on position par sa continuité même avec le bulbe et, par le bulbe, avec l’encéphale.
- b) A son extrémité inférieure, elle est rattachée au squelette par un prolongement de la dure-mère, qui, sous le nom de ligament coccygien de la moelle, enveloppe le filum terminale à la manière d’une gaine, descend avec lui dans le canal sacré et vient finalement s’implanter sur la base du coccyx.
- c) Dans toute sa hauteur, enfin, depuis l'atlas jusqu’à la première lombaire, la moelle
Le ligament dentelé à la région dorsale.
1, dure-mère. — 2, ligament dentelé. — 3, face postérieure de la moelle entourée de la pie-mère. — 4, une racine postérieure. — 5, une racine antérieure. — 6, veine médiane postérieure.
est fixée à la surface interne de la dure-mère (laquelle est fixée elle-même au rachis par les gaines fibreuses qu’elle jette sur les nerfs spinaux) : 1° par un système de prolongements filiformes, qui partent irrégulièrement de ses faces antérieure et postérieure et qui, d’autre part, viennent se fixer, les unes sur la face antérieure, les autres sur la face postérieure de la dure-mère ; 2° par deux longs rubans, l’un droit, l’autre gauche, qui, sous le nom de ligaments dentelés, vont de ses parties latérales à la partie correspondante de la dure-mère. Ces prolongements filiformes, ainsi que les ligaments dentelés, sont des dépendances de la pie-mère et seront décrits avec cette dernière membrane (voy. Méninges).
Si la moelle n’a pas de contact immédiat avec sa gaine fibreuse, elle n’est pas pour cela flottante dans le liquide céphalo-rachidien qui remplit l’espace péri-médullaire. La moelle reste indépendante et impassible pendant les mouvements de la colonne vertébrale et n’arrive jamais au contact de la paroi osseuse. L’élongation de la moelle et clés nerfs ayant été introduite en thérapeutique, on en a étudié les effets mécaniques sur le cadavre. Les résultats obtenus permettent d’admettre que ni la traction sur le nerf sciatique, ni l’auto-suspension (méthode de Serres) n’allongent sensiblement la moelle. Seule la flexion de la colonne vertébrale l’allonge un peu (distension par le procédé de flexion forcée de Bénédikt).