Les nerfs olfactifs sont constitués par l'ensemble des filets (filets olfactifs) qui se détachent de la face inférieure du bulbe olfactif, traversent la lame criblée de l'ethmoïde et vont se distribuer à la partie supérieure de la muqueuse des fosses nasales.
Le nerf olfactif est le nerf du cerveau antérieur ou télencéphale. On a vu que certaines parties de ce télencéphale sont plus spécialement annexées à l'appareil olfactif; elles constituent le rhinencéphale. Le rhinencéphale est extrêmement développé chez les animaux macrosmatiques, comme les vertébrés inférieurs et certains mammifères (carnassiers); il fait presque entièrement défaut chez les anosmatiques, comme les cétacés; chez les microsmatiques comme les primates, il présente un certain degré d'atrophie. C'est précisément à cause de cette régression du rhinencéphale chez l'homme que certaines parties du cerveau olfactif perdent leurs caractères objectifs de lobes cérébraux et acquièrent une certaine ressemblance avec un nerf périphérique. C'est cette ressemblance, d'ailleurs très grossière, qui déterminait les anciens anatomistes à décrire le bulbe olfactif, la bandelette olfactive et ses racines comme parties constituantes de la première paire. Les données de l'histologie, de l'embryogénie et de l'anatomie comparée protestent contre ce mode de description. On ne doit décrire et en fait on ne décrit plus à l'heure actuelle, sous le nom de nerf olfactif que l'ensemble des filets qui vont du bulbe olfactif à la muqueuse pituitaire.
Constitution
Le nerf olfactif, ainsi compris, est constitué par les prolongements cylindraxiles des neurones olfactifs périphériques, c'est-à-dire des cellules olfactives qui ont leur siège dans la muqueuse pituitaire. Ces prolongements cylindraxiles viennent se terminer au niveau des glomérules du bulbe olfactif en se mettant en contact par leur arborisation terminale avec le bouquet formé par les expansions protoplasmiques des cellules mitrales.
Le nerf olfactif est donc l’homologue de la portion des racines postérieures des nerfs rachidiens qui s'étend du ganglion à la moelle. L’ensemble des cellules olfactif qui représente un véritable ganglion étalé qui mérite le nom de ganglions olfactif.
Description anatomique
Les branches issues du bulbe olfactif ont été et découverte en 1536 par Massa. Mentionnées par la plupart dos anatomistes du XVème siècle (Willis Vieussens, etc.), elles ne sont bien décrites que depuis Scarpa (1789).
Au nombre de 15 à 18, les filets olfactifs se détachent de la face inférieure du bulbe olfactif. Leur calibre est extrêmement variable.- Les plus volumineux s'enfoncent dans les fossettes que présente la face supérieure de la lame criblée de ethmoïde et se tamisent à travers les trous que présente le fond de ces fossettes (Voy. Ostéologie. p. 397). D'autres, plus grêles, traversent sans se ramifier des canaux plus étroits. Arrivés dans les fosses nasales, les filets olfactifs se partagent en deux groupes, l'un interne, l'autre externe.
Les branches internes, au nombre de douze à seize (Valentin), descendent appliquées contre la lame perpendiculaire de l'ethmoïde, sur laquelle elles laissent souvent leur empreinte. Dans la partie supérieure de leur trajet, ces branches échangent entre elles de nombreuses fibres, constituant ainsi un plexus à mailles rhomboïdales; plus bas, elles s'étalent en éventail et prennent un aspect rayonné.
Les branches externes plus nombreuses que les précédentes (douze à vingt d'après Valentin), affectent une disposition .sensiblement identique. Mais le plexus qu'elles forment, en s'anastomosant, a des mailles plus serrées que celles du plexus interne.
Il est difficile de préciser, scalpel en main, la limite inférieure de la zone de
Distribution du nerf olfactif
On admet généralement qu’elle s’étend sur la paroi externe jusqu'au bord libre du cornet moyen et qu'elle occupe sur la paroi interne la moitié supérieure de la cloison. Cependant des recherches récentes de Von Brunn (die Nervendigung in Riechepitel. Naturforsh. Gesellschaft. Rostock 1891) semblent démontrer que cette zone est beaucoup moins considérable. En dehors comme en dedans, elle ne dépasserait pas un plan horizontal passant à 2 millimètres au-dessus du bord libre du cornet supérieur.
Il importe cependant de remarquer que chez le fœtus la sphère de distribution du nerf olfactif est plus étendue. Il donne notamment des filets au tube de Ruysch qui est généralement regardé comme le reliquat atrophié de l'organe de Jacobson. Il se produirait donc, au cours du développement, une régression dans le champ de distribution de la première paire.
Ajoutons encore que Remy (Th. d’agrég. Paris 1880) a pu suivre quelques filets du nerf olfactif jusque dans la muqueuse des sinus sphénoïdaux.
Anastomoses
Valentin, chez l'homme, Swann chez les oiseaux, Fischer chez les batraciens, ont décrit des anastomoses entre l'olfactif et la Vème paire. Ces anastomoses ne sont rien moins que démontrées et avec ce que nous savons aujourd'hui de la constitution de l'olfactif, il devient difficile d'admettre leur existence.
Structure
Le nerf olfactif est essentiellement composé de fibres nerveuses amyéliniques. Entre ces fibres s'interposent des noyaux de 0,16µ de long, entourés d'une petite quantité de protoplasma. Nous retrouvons donc là les caractères fondamentaux des fibres de Remak, éléments constituants habituels des nerfs sympathiques : autour des fibres de l'olfactif comme autour des fibres sympathiques, il n'y a ni myéline, ni gaine de Schwann. L’analogie entre les libres du nerf olfactif et les fibres du sympathique n'est cependant pas absolue, car les fibres de la première paire diffèrent des fibres sympathiques par leur volume plus considérable et l'absence d'anastomoses. Les fibres du nerf olfactif se groupent en faisceaux entourés par une gaine endothéliale, facile à mettre en évidence par la nitratation (Key et Retzius, Studienin der An. des Nervensystems u. des Bindegewebes, Stockholm, 1875 et 1876. t. II. tab. XV. fig.II).
Gaines méningées des nerfs olfactifs
Les filets olfactifs doivent, pour pénétrer dans les fosses nasales, traverser les trois enveloppes de l'encéphale. Key et Retzius ont précisé la façon dont ces enveloppes se comportent vis-à-vis des filets olfactifs. Nous leur empruntons les éléments essentiels de cette description.
La pie-mère se réfléchit sur les filets olfactifs et leur forme leur enveloppe propre ou névrilème. Le tissu sous-arachnoïdien se prolonge de même autour de chaque filet en lui constituant véritable manchon cylindrique. L'arachnoïde se déprime au niveau des trous de la lame criblée en formant des culs-de-sac peu profonds et ne se prolongeant jamais autour des filets dans leur trajet dans la pituitaire.
Quant à la dure-mère, elle s'enfonce dans les courts canaux de la lame criblée, tapisse les parois de ces canaux et, arrivée au niveau de leur embouchure nasale, se divise en deux feuillets : l’un forme un manchon fibreux au filet olfactif correspondant, l'autre se continue avec le périoste de la face nasale de la lame criblée.
En somme il n'existe autour des filets olfactifs qu'un seul espace injectable, c'est la gaine formée par le tissu sous-arachnoïdien; ces espaces péri-olfactifs représentent donc de véritables diverticules de la grande cavité sous-arachnoïdienne et on les injecte sans difficulté en poussant une injection dans cette cavité. Remarquons en passant qu'une injection poussée dans la cavité arachnoïdienne injecte aussi les gaines péri-olfactives. Il faut en conclure que cette cavité est mal close au niveau des culs-de-sac qu'elle forme autour des trous de la lame criblée.
Il existe entre la disposition des gaines méningées de la première et de la deuxième paire de notables différences : alors qu'autour des filets olfactifs nous ne trouvons qu'une seule gaine injectable, la gaine sous-arachnoïdienne; nous en trouverons deux, la gaine arachnoïdienne et la gaine sous-arachnoïdienne autour du nerf optique.
Lorsque Axel Key et Retzius injectaient l'espace sous-arachnoïdien, ils arrivaient le plus souvent à remplir, en même temps que les gaines sous-arachnoïdiennes des nerfs olfactifs, les lymphatiques de la muqueuse nasale. Ils n'ont cependant jamais vu de communications directes entre les gaines péri-olfactives et les lymphatiques de la muqueuse. L'injection passait dans ceux-ci par l’intermédiaire de fins canaux qui traversaient les trous de la lame criblée en même temps que les filets olfactifs et venaient se jeter dans l’espace sous-arachnoïdien. Il y a donc communication directe entre cet espace et les lymphatiques de la pituitaire et non communication par l’intermédiaire des gaines péri-olfactives.
Anomalies
On a signalé un certain nombre de cas d’absence du nerf olfactif. Le plus souvent l’anomalie porte non seulement sur les filets olfactifs (nerf olfactif proprement dit), mais sur le bulbe et le tractus olfactif, c'est-à-dire sur une partie des voies olfactives centrales. La plupart des observations (Rosenmüller. Cerutti.... etc.,) sont anciennes et incomplètes et il est difficile de savoir s'il s'agit dans ces cas d'une réduction extrême de l'appareil olfactif ou d'une absence véritable Trois cas plus récents, celui de Claude Bernard (Leçons sur le système nerveux, T. II. p. 228. 1858), celui de Le Bec (Voy. Communication du professeur M. Duval, -in Bulletins Soc. Anthropologie 1884) et celui de Testut (Anat. Hum. T. III, p. 559, 3 éd.), sont plus explicites. Chez le sujet de Cl. Bernard, on trouva une absence complète du nerf olfactif ; le sillon olfactif existait cependant. Dans le cas de Le Bec, la disposition était la suivante : « A la place du tractus et du bulbe olfactif, on trouve : du côté gauche un tronçon nerveux ayant la forme d'une petite bandelette longue de 8 millimètres, large de 2 et de forme plate. Elle part du point où normalement se réunissent les racines olfactives, se porte en avant, atteint la face inférieure du nerf optique gauche, s'y accole par l'intermédiaire de la pie-mère et finit brusquement. Du côté droit, le nerf olfactif est moins formé encore; la substance grise du lobe frontal présente une intumescence du volume d'un gros pois, exactement à l'endroit où doit se placer le nerf olfactif. Immédiatement derrière et sur un plan plus profond, se voit un tout petit bourgeon grisâtre qui représente le nerf olfactif, lequel n'a pas plus de 2 millimètres de longueur. » Des deux côtés, la racine externe était conservée; la racine interne était moins apparente que normalement. « La lame criblée de l'ethmoïde présentait sa structure normale; elle était perforée et les trous étaient traversés par >in prolongement fibreux semblable à la gaine que la dure-mère fournit normalement aux branches olfactives. » Sur le sujet de Testut, il n'y avait « aucune trace du bulbe olfactif et de la bandelette olfactive ».
Dans ces trois cas l’odorat était conservé: on peut se demander alors, si, dans des faits de ce genre, il y a suppléance fonctionnelle du nerf olfactif par un nerf voisin ou bien si, en dépit de l'absence macroscopique de l’appareil olfactif, il n'y a pas continuité histologique de la voie olfactive. Seul, un examen microscopique peut donner la réponse à cette question. Or, on ne l'a pratiqué que dans le cas de Le Bec où le professeur Duval a constaté d'une part la présence de filets olfactifs dans le pituitaire, d'autre part, l'existence sur le cerveau d'une implantation non pas seulement apparente, mais réelle du nerf olfactif. , M. Duval en a logiquement déduit la [présence des parties intermédiaires. Le cas de Le Bec devient donc un cas de pseudo-absence. -En est-il de même du cas de Cl. Bernard cl de celui de Testut ? On ne saurait répondre, l'examen histologique n'ayant pas été fait.
D'après traité d'anatomie humaine par P.Poirier.